Abstract in English

Neumeier U. (1998) Le rôle de l'activité microbienne dans la cimentation précoce des beachrocks (sédiments intertidaux). Thèse, Université de Genève. Terre et Environnement n° 12, 183 p.

Résumé

Les beachrocks sont formés en quelques dizaines d'années dans la zone intertidale par la cimentation précoce des sédiments de plage. Différentes hypothèses ont été proposées pour expliquer la rapidité de ce processus; elles peuvent être regroupées en deux catégories : 1) des mécanismes physico-chimiques (précipitation lors de l'évaporation de l'eau de mer, précipitation liée à des sursaturations dans la zone de mélange des eaux marines et continentales, précipitation suite au dégazage de CO2 à partir d'eaux continentales riches en carbonates); 2) des mécanismes biologiques (précipitation influencée par le métabolisme microbien, nucléation sur un substrat organique, piégeage de particules micritiques dans un mucus organique).
Durant ce travail, de nombreux beachrocks récents de Crète, de Grèce continentale, de Mer Rouge, de Polynésie française et d'Australie ont été observés dans une grande diversité de contextes géologiques.
L'étude des ciments a permis de définir quatre modèles de cimentation principaux (dominante aragonitique, dominante calcite magnésienne palissadique, dominante calcite magnésienne micritique, dominante calcite magnésienne peloïdale) et 8 variantes. Tous les ciments sont en aragonite ou en calcite magnésienne. La diagenèse débute généralement par un ciment micritique, dont la présence semble contrôler la cimentation des beachrocks. Il présente des morphologies microbiennes potentielles : des ondulations irrégulières et des formes globulaires de 0.5-2 µm. Cette première phase est souvent suivie par un ciment prismatique.
Les analyses géochimiques de l'eau interstitielle de 6 beachrocks ont permis de caractériser le milieu de formation. Il n'a été observé aucune augmentation de la saturation en CaCO3, telle que prédite par les hypothèses de formation physico-chimiques. La précipitation lors de l'évaporation de l'eau de mer est négligeable dans les beachrocks en bancs inclinés. La précipitation liée à une sursaturation dans la zone de mélange et la précipitation suite au dégazage de CO2 à partir d'eaux continentales riches en carbonates ne sont pas actives dans les beachrocks étudiés. Ces deux mécanismes nécessitent des conditions très particulières, et sont probablement peu fréquents.
Pour différencier les effets des processus biologiques et physico-chimiques, un modèle de laboratoire reproduisant le milieu de formation des beachrocks a été construit (marées, sédiments, composition de l'eau, température, évaporation...). Les conditions de deux beachrocks de la Mer Rouge et d'Australie ont été simulées pendant des périodes de 3-4 mois. Dans les expériences ensemencées avec des micro-organismes récoltés dans les beachrocks, une biominéralisation a produit des précipités caractéristiques qui pourraient correspondre aux ciments micritiques. En revanche, la précipitation était beaucoup plus limitée dans les expériences abiotiques de contrôle.
Ces résultats confirment l'importance de l'activité microbienne lors de la formation des beachrocks en bancs inclinés. Le premier ciment micritique, qui semble contrôler la cimentation et produire la consolidation initiale, est formé sous une forte influence microbienne dans ou à proximité d'un biofilm recouvrant la surface des grains. La présence de ce ciment est nécessaire pour le développement du ciment prismatique subséquent; celui-ci résulte d'une précipitation principalement abiotique lors d'une circulation des fluides plus élevée. Ce changement des conditions peut survenir lorsque le beachrock est découvert par l'érosion littorale et soumis plus directement à l'action de la houle.
Les facteurs principaux qui contrôlent la distribution des beachrocks et la minéralogie des ciments sont la température, la stabilité de la plage et l'activité microbienne. Divers inhibiteurs de la précipitation peuvent avoir une influence secondaire. Aucune corrélation entre la présence d'eau douce et la cimentation des beachrocks n'a été observée.
A côté du type " classique " de beachrock en bancs inclinés vers la mer, il existe, dans les tidal flats sableux et hypersalins, des beachrocks plats constitués d'une croûte subhorizontale à la surface de l'estran. Leur formation résulte de l'immobilisation des sédiments de surface par des tapis microbiens et de la précipitation de ciment aragonitique sous l'effet conjoint de l'activité microbienne et de l'évaporation de l'eau de mer.



Neumeier U. (1998) The role of microbial activity in early cementation of beachrocks (intertidal sediments). Ph.D. thesis, University of Geneva. Terre et Environnement No 12, 183 p.

Abstract

Beachrocks are formed in the intertidal zone by rapid cementation of beach sediments over several decades. Various hypotheses have been proposed to explain the rapidity of this process; they may be classified in two groups: 1) physico-chemical mechanisms (spontaneous precipitation from evaporating seawater, spontaneous precipitation related to supersaturations in the mixing zone of marine and continental waters, precipitation following CO2 degassing of continental carbonate-rich waters); 2) biological mechanisms (precipitation influenced by microbial metabolism, nucleation on organic substrates, trapping of micritic particles in an organic mucus).
During this work, many recent beachrocks from Crete, continental Greece, the Red Sea, French Polynesia and Australia were observed in a great variety of geological contexts.
The study of cements permits to define four principal cementation models (dominant aragonite, dominant bladed high-magnesian calcite, dominant micritic high-magnesian calcite, dominant peloidal high-magnesian calcite) and 8 variants. All cements consist of aragonite or high-magnesian calcite. Diagenesis usually begins with micritic cement, whose presence seems to control beachrock cementation. It presents potential microbial morphologies: irregular undulations and globular forms 0.5-2 µm in size. This first phase is often followed by prismatic cement.
Geochemical analyses of interstitial water of 6 beachrocks allow to characterise the formation environment. No increase of CaCO3 saturation was observed, contrary to predictions of the physico-chemical formation hypotheses. Precipitation during sea-water evaporation is negligible in beachrocks with seaward-dipping beds. Precipitation related to supersaturation in the mixing zone and precipitation following CO2 degassing from continental carbonate-rich waters do not occur in the studied beachrocks. These two mechanisms require very particular conditions, and are probably not very frequent.
In order to differentiate the effects of biological and physico-chemical processes, a laboratory model was developed, which reproduces natural conditions of beachrock formation (sediments, tides, water composition, temperature, evaporation...). Environmental conditions of two beachrocks from the Red Sea and Australia were simulated for periods of 3-4 months. In the experiments sown with micro-organisms collected in the beachrocks, the biomineralisation produced characteristic precipitates, which could correspond to micritic cements. On the contrary, precipitation was much less in the abiotic control experiments.
These results confirm importance of microbial activity during the formation of beachrocks with seaward-dipping beds. First micritic cement, which seems to control cementation and produce initial consolidation, is formed under a strong microbial influence within or near a biofilm covering the grain surface. The presence of this cement is necessary for the development of subsequent prismatic cement; the latter results from mainly abiotic precipitation during increased fluid circulation. This change of conditions can occur when the beachrock is exposed by coastal erosion and more directly subjected to swell action.
The main factors that control beachrock distribution and cement mineralogy are temperature, beach stability and microbial activity. Various precipitation inhibitors can have a secondary influence. No correlation between the presence of fresh water and cementing of the beachrocks was observed.
Besides the 'classic' type of beachrock with seaward-dipping beds, there are flat beachrocks made up of a subhorizontal crust on the intertidal surface of sandy hypersaline tidal-flats. Their formation results from the immobilisation of superficial sediments by microbial mats and from aragonitic cement precipitation under the combined effects of microbial activity and sea-water evaporation.


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